Un rapport parlementaire accablant

Le 02/07/2025

Dans Actualités

Le rapport parlementaire de Violette Spillebout et Paul Vannier sur les violences ordinaires en milieu scolaire est paru.

Il pointe du doigt l'enseignement catholique dont certaines caractéristiques ont pu favoriser des violences faites aux enfants.

Il ne se contente pas de dénoncer et fait plusieurs propositions...

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Silence, internat et emprise : les zones d’ombre de l’enseignement catholique

Internats isolés, image idéalisée du prêtre, confession imposée : un nouveau rapport parlementaire met en lumière les facteurs spécifiques à l’enseignement catholique qui ont pu favoriser les violences faites aux enfants. Un constat longtemps occulté au nom du silence institutionnel.

« Loi du silence », image sacralisée du prêtre et présence d’internats : peut-on invoquer un facteur propre à l’Église catholique dans certaines violences ayant visé des enfants en milieu scolaire, au cœur d’un rapport publié mercredi ?

Ce rapport des parlementaires Violette Spillebout et Paul Vannier parle de « phénomènes accentués dans l’enseignement catholique », en pointant « outre la banalisation des violences éducatives ordinaires et le tabou des violences sexuelles, d’autres caractéristiques tant organisationnelles que culturelles ».

Vannier spillebout

L’Église catholique avait découvert une partie du problème en 2021, lorsqu’une commission indépendante (Ciase) mandatée par ses soins avait publié un rapport accablant, estimant à 330 000 le nombre de mineurs victimes de violences sexuelles au sein de l’Église.

Parmi elles « 108 000 auraient été agressées dans le cadre de l’enseignement scolaire catholique », rappelait en avril le président de la Ciase, Jean-Marc Sauvé.

L’Église a alors créé deux instances de réparation morale et financière : l’Inirr, pour les faits commis dans les diocèses, et la CRR, pour les congrégations. Mais à l’époque, le volet scolaire avait été « assez peu commenté et développé », soulignent Violette Spillebout et Paul Vannier. Et ce, alors même que les écoles catholiques représentent 96 % de l’enseignement privé sous contrat.

Pourquoi le milieu scolaire ?

Plusieurs éléments ont pu accentuer ce phénomène de violences.

D’abord la présence dans de nombreux établissements catholiques d’internats, qui jouent « un rôle de facilitateur pour les agresseurs » : lors de son audition, Jean-Marc Sauvé a parlé de « prévalence près de trois fois supérieure » dans les établissements privés catholiques.

Ensuite un modèle éducatif « explicitement plus strict » pouvant séduire certains parents. Cité dans le rapport, le chercheur Éric Debarbieux pointe la définition de Saint-Augustin de l’enfant qui « fonde pour des siècles une pédagogie du redressement, dont la hantise du péché originel justifiera tous les débordements ».

La Ciase évoquait elle d’autres facteurs sociaux, par exemple dans les familles d’agriculteurs des années 1950 attendant un retour de « notabilité » après avoir confié leur enfant à l’institution religieuse.

Elle pointait aussi « l’obligation de la confession, inscrite dans le règlement » de nombreuses écoles, mais organisée dans la chambre-bureau du prêtre, et donc favorable aux violences.

Le tout sur fond de « loi du silence particulièrement prégnante » au sein de l’Église, ajoutait ce rapport qui soulignait « le déni et l’euphémisation des abus, la culture du secret et du silence, la peur du scandale » dévoyée en protection de l’institution.

L'omerta, un mal spécifique à l'Eglise ?

« L’omerta a existé, mais partout dans notre société », affirme Philippe Delorme, le secrétaire général de l’enseignement catholique. La Ciase s’était elle employée dans son rapport à « invalider la thèse « relativiste » selon laquelle, la situation propre à l’Église catholique n’aurait été que le reflet des mœurs du temps ».

Sur le célibat des prêtres, ce rapport de 2021 estimait en revanche qu'« il n’y a clairement pas de lien de causalité » avec les violences sexuelles. Mais « le risque existe que le célibat participe d’une survalorisation de la personne du prêtre ».

Le rapport soulignait aussi « la vision taboue de la sexualité qui peut favoriser la culture de l'« absurde », où par une sorte de nivellement les violences sexuelles ne sont « ni clairement définies, ni clairement sanctionnées ».

Eduquer EVARS

Dans une tribune en mai 2020, le père Laurent Stalla-Bourdillon soulignait lui que l’image idéalisée du prêtre a pu conférer aux abuseurs un « sentiment de toute-puissance et d’impunité ».

Le risque est clair, car « lorsqu’on est directeur de conscience, c’est assez facile d’avoir une emprise spirituelle », selon Antoine Garapon, le président de la CRR. Parmi ses recommandations, le rapport Vianner-Spillebout préconise une levée du secret de la confession en cas de violences sur mineur.

Le rapport s’interroge aussi sur l’organisation de l’enseignement catholique autour du Sgec, comparé à « un ministère bis de l’Education nationale ». Le nouveau président de la CEF, Jean-Marc Aveline, a estimé, juste après son élection en avril, que l’Église « doit mieux faire » sur la question des violences sexuelles dans l’enseignement catholique. La CEF a aussi changé l’organigramme à la tête du Sgec.

Vous trouverez l'intégralité du rapport parlementaire en question (612 pages quand même) sur le site internet de l'Assemblée Nationale à l'adresse :

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/rapports/cion-cedu/l17b1642-ti_rapport-enquete